Gunna – Wunna

Critique

Un an après avoir sorti son premier album studio Drip Or Drown 2, Gunna est déjà de retour avec son deuxième long format, le très fade Wunna.

Un album coloré…

Ou plutôt un album qui tente de l’être. La cover de Wunna est un dessin inspiré de l’Homme de Vitruve, œuvre du peintre Léonard De Vinci, qui représenterait les proportions parfaites d’un corps humain au centre d’un cercle. On en déduit donc que nous allons avoir affaire à la forme parfaite de Gunna, ce qui place les attentes assez haut.

De toute évidence, le rappeur n’a pas pour habitude d’avoir de belles covers d’album, mais cette fois-ci il a fait un effort : elle est mieux que les précédentes. Les couleurs chaudes (orange, jaune, rose…) collent à l’ambiance musicale proposée tout au long de Wunna.

Cohérent

Gunna a expliqué que le titre du projet -en plus d’être son surnom- était l’acronyme de « Wealthy Unapologetic N^gga Naturally Authentic », traduisez : « N^gro inexcusablement riche et naturellement authentique ». On comprend d’entrée de jeu que le rappeur compte faire ce qu’il a toujours fait, de l’égotrip pour vanter ses richesses et son style. Il n’a pas menti : Gunna passe son temps à nous répéter inlassablement qu’il est riche, qu’il possède des montres ainsi que des vêtements luxueux, qu’il fréquente des bad bitches et que la drogue fait partie intégrante de sa vie. Le seul morceau qui sort du lot en termes d’écriture est DON’T PLAY AROUND : Gunna y pose un rap plus introspectif et moins superficiel. Il dédie d’ailleurs cette chanson à Nipsey Hussle.

Evidemment, le rap lifestyle est la marque de fabrique de Gunna. Et la répétitivité des thèmes n’aurait pas posé problème si les morceaux étaient très différents les uns des autres. Mais ce n’est pas le cas.

Ennuyant

Quelques morceaux proposent des sonorités peu habituelles dans la discographie de Gunna et réussissent à transporter l’auditeur. Parmi ceux-ci, il y a le single SKYBOX, qui donne envie de s’évader, surtout en période de confinement. Il y a également ARGENTINA, l’introduction (et la meilleure chanson) du projet, qui fait saliver à propos du pays dont elle porte le nom. Sur une prod ensoleillée de Wheezy, Gunna raconte sa rencontre avec des filles venant d’Argentine, et nous rappelle (au cas où on l’aurait oublié) qu’il est riche. Mais ces pistes font figure d’exceptions : trop peu sont originales et réussissent leur mission.

Gunna emprunte souvent des flows qu’il a déjà empruntés autrefois, et finalement, il ne prend aucun risque digne de ce nom. Offrir un album de 18 morceaux lui porte préjudice, car peu sont mémorables. On en ressort avec une impression qu’il y a trop et pas assez à la fois : quantité manquant de qualité.

Invités prévisibles

Pour les collaborations, là encore Gunna n’est pas sorti de sa zone de confort. C’est simple : il a collaboré par le passé avec tous les invités présents, et offrait de bien meilleurs résultats. Dans BLINDFOLD (feat. Lil Baby), le duo dévoile exactement ce qu’on peut attendre de lui, l’aspect mémorable en moins. TOP FLOOR (ft. Travis Scott) utilise un sample de Hot, morceau de Young Thug apparu en 2019, dans lequel figuraient déjà Gunna et Travis Scott. Ce qui confirme que les deux protagonistes ont clairement manqué d’inspiration. Young Thug lui-même est sans grande surprise présent dans Wunna, il est d’ailleurs l’invité qui tire le mieux son épingle du jeu : il procure le meilleur flow de l’album à l’occasion de DOLLAZ ON MY HEAD. Il est aussi à l’affiche de l’outro FAR, qu’il bonifie par sa présence.

COOLER THAN A BITCH est la track la plus décevante. Vu la présence de Roddy Ricch (le rappeur de Compton qui transforme tout ce qu’il touche en or et qui truste les sommets des charts depuis de longs mois), on pouvait s’attendre à un banger. Néanmoins il n’en est rien : une fois de plus on se retrouve avec une chanson fade qui est nettement en dessous de leur réalisation passée. Et Nechie, ami d’enfance de Gunna, s’intègre trop dans l’univers de ce dernier, et propose donc un rap prévisible qui manque de personnalité (ADDYS).

Circulaire

Le constat est simple, Wunna fait honneur à sa cover, non pas pour le côté parfait des proportions, mais bien pour l’aspect circulaire qu’on y trouve : Gunna tourne en rond. Son album s’inscrit dans la tendance selon laquelle les principaux piliers de la trap mélodieuse d’Atlanta peinent de plus en plus à être originaux, à force d’avoir un cercle restreint de collaborateurs (tant au niveau des producteurs que des rappeurs). Et ces artistes qui ont longtemps symbolisé un vent de fraîcheur et de renouveau dans le rap finissent par proposer trop souvent les mêmes choses. Pendant la conception de cet album, Gunna a beaucoup voyagé, malheureusement, cela ne se ressent pas dans les sonorités. Il aura quand-même eu le mérite de bien choisir ses prods.

Finalement, Wunna est une œuvre oubliable, qui plaira sans doute aux adorateurs du rappeur, mais qui ne laissera pas une trace indélébile dans le hip-hop. De toute façon, Gunna semble juste obsédé par l’argent, alors il doit être heureux : son projet a connu un beau score commercial ; à défaut d’un succès critique.

Rotka
Rotka
Life's a bitch and then you die
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