La face cachée d’Ashkidd

Alors que le jeune rappeur strasbourgeois était sur le point de nous dévoiler son premier album, il livre exclusivement son single « Hallucinations » et annonce le report de la sortie de son projet à janvier 2021. Une annonce qui renforce les intrigues au sujet de l’artiste. Nombreux étant ceux qui interrogent cette figure du rap. Qui est-il vraiment ? Ashkidd ? Claude Bourgeois ? 16poetic ? Autant de personnages qui cachent autant d’étapes de sa vie.

Une interrogation identitaire perpétuelle qu’il sonde notamment dans son morceau Cœur de Gangster, tiré de son dernier EP ; « À 12 ans, j’ai un rêve, devenir moi-même (…) à 24 ans, j’me balade sur ma planète. Tu penses que je joue un rôle mais c’est moi ». Ashkidd propose autant de facettes de lui que de morceaux.

Vision introspective

En savoir plus sur ce prodige n’est pas chose simple. Il s’exprime uniquement dans ses textes.

« Mes chansons sont des interviews. Avant toutes les interviews qu’on me proposait, je me posais la question en tant qu’humain ; mais qu’est-ce que j’ai à leur dire de plus ? »

Médiatiquement effacé, Ash propose une attitude complètement différente d’autres artistes. Un choix qui laisse ses auditeurs libres d’interprétation et d’imagination face à ses créations.

Son rap, c’est son histoire. Un rap doux, mélancolique et sophistiqué dont lui-même connait la recette. Influencé par sa ville natale, Strasbourg, il décrit ce lieu comme « une bulle » où toute la magie a opéré. Son enfance fut bercée par de multiples influences musicales. D’origine franco-italienne, il puise dans son éducation, ses souvenirs et ses premières expériences, une multitude d’éléments pour garnir ses textes. D’abord beatmaker, Ashkidd avait un pied dans la musique avant même de poser sa voix sur ses propres productions.

Prendre le temps d’être musicien avant de devenir rappeur était sa priorité. Par la suite, aussi bon rappeur que producteur, il s’est rapidement fait une place dans ce milieu, faisant preuve d’une singularité étonnante. Des paris risqués, il ne manque pas d’en faire, notamment avec sa reprise d’Indochine dans le titre Nostalgie.  Ayant aussi marqué les esprits avec Lolita, le jeune homme n’en est pas à son coup d’essai. Il possède déjà plusieurs projets à son actif, dont Cruise, sorti en 2015, Mila 809, disponible deux ans après et dernièrement Stéréotype.

Ces projets reflètent bien son univers musical et permettent de déceler quelques éléments personnels sur leur auteur. Celui-ci combine parfaitement des sujets qui parlent à son public : l’amour, l’argent, les voyages et la drogue. Tout cela greffé à des mélodies nostalgiques et envoûtantes. Une manière pour lui de partager son vécu et ses sentiments.

« J’m’amuse avec l’automatique, sans affaires dans l’allée
La vibe est poétique, tu sens la peine s’en aller
On avait tout mis dans nos disques, nos souvenirs, quelle importance?
Tant que le soleil brille, que la mer bleue est salée
 »

16 (stéréotype)

Derrière ces facettes énigmatiques et cette apparence impassible, le rappeur de 27 ans tatoué de trois mots symboliques « cœur de ice », nous livre de belles histoires d’amour, d’autres moments de solitude et un profond sentiment de nostalgie qui l’habitent depuis toujours ; comme nous le soumettent justement les cinq titres de son dernier EP Stéréotype, ajouté il y a deux ans à sa discographie.

Dans un registre planant et cloud, Ash joue le rôle du porte-parole d’une jeunesse en quête de sens. De ce projet, on peut retenir la puissance d’Akira, la douceur du morceau 16 et la sincérité du premier titre Cœur de gangster.

Un retour hallucinant

Deux ans après la sortie de son dernier EP Stéréotype, Ash revient avec deux singles ; Holà et Fayette. Il appuie ensuite son retour en dévoilant un nouveau titre clippé « Hallucinations », proposant une perspective moderne de sa musique, plus esthétique et mature. Il certifie une nouvelle fois qu’il est bien loin de tous stéréotypes manifestes du rap. Fidèle à son personnage énigmatique, le jeune homme exprime ses perceptions de l’amour moyennant une réelle harmonie entre le texte, la sonorité et le visuel.

Le clip, réalisé en deux parties par deux réalisateurs distincts, conduit le fil de l’histoire. Dès les premières notes, la caméra suit Ash, errant dans un décor urbain. Sous influence de drogues, il est à la recherche de sa muse qu’il semble avoir créée de toute pièce dans son imagination.

« Chérie j’suis dans ta zone
J’appelle, dis-moi qu’tu descends
Et là j’ai pris des drogues
Ouais j’ai du mal à redescendre
 »

Il court à sa perte, ne parvient pas à la trouver et plonge dans de nouvelles consommations illicites. Ses hallucinations l’emmènent jusqu’à une plage déserte, toujours à la poursuite de cette jeune femme. Un décor paradisiaque, du soleil, du sable fin et le vol de papillons bleus qui accentuent encore plus cette idée de rêve éveillé.

« Sors de ma vie
J’crois qu’j’ai des hallucinations
Oui j’ai des hallucinations »

La deuxième partie du clip, nous emmène une nouvelle fois dans un décor plus sombre, soutenu d’une rythmique plus lente. Une transition bien maîtrisée par le producteur Dany Synthé, qu’il modère à l’aide d’un BPM affaibli, d’une mélodie presque funèbre et d’une alternative de drums plus chargés. Ainsi, escorté de visages cagoulés, d’armes et de bolides teintés, Ashkidd se met à rapper de manière impassible, comme étant revenu à la raison et prêt à nous envoyer la suite instantanément.

Une nouvelle fois, le jeune homme propose un double aspect de sa personnalité à travers ces différents reliefs musicaux au sein d’un même morceau. Le report de la sortie de son album laisse supposer qu’il n’était pas encore prêt à nous livrer son contenu ou qu’il s’amuse des réflexions dubitatives de son public et compte le faire patienter encore un peu.

Dernières pièces du puzzle

Les pièces commencent à s’assembler autour du personnage d’Ashkidd mais, qui sont donc Claude Bourgeois et 16peotic ?

Son premier album sera dévoilé prochainement. Un projet qui nous aidera certainement à cerner l’homme et l’artiste qu’il est. Restera-t-il fidèle à sa plume mélancolique et sincère ? Dans cette tourmente de suggestions infinies que nous offre l’industrie du rap à l’heure actuelle, il est difficile de se démarquer et proposer un projet révolutionnaire mais Ashkidd reste un narrateur par excellence, maniant les mots à la perfection tout en associant la nostalgie et l’amertume. Restez à l’écoute et appréciez chaque pièce du puzzle que l’artiste dévoile.

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