Validé saison 2, la vie après la mort

Franck Gastambide conserve les mêmes éléments que la précédente saison de Validé. Du rap, de la rue et de l’humour. On s’y attendait, mais pour autant cette seconde histoire conserve son côté addictif. Une addiction menée par l’action des personnages, qu’elle soit subie, pensée ou prévisible. Les trente minutes des neuf épisodes passent à toute vitesse. 

Seine-Saint-Denis Style

L’histoire se déroule un an après la fin tragique d’Apash, personnage joué par Hatik. Elle recommence à Aubervilliers, mais laisse place à un nouveau personnage principal à Bobigny, Lalpha interprétée par la persuasive Laetitia Kerfa. La localisation est légèrement différente, mais les décors sont les mêmes, une cité filmée en vue aérienne.

La mort de Clément survenue précédemment n’est quasiment pas évoquée. Le contexte de deuil et de traumatisme non plus, tout est quasiment laissé dans la saison 1, balayé dès le premier épisode. Tel un goût d’inachevé.

William remis de ses blessures et Brahim sont désormais à la tête de leur propre label (Apash Music) et souhaitent signer rapidement un artiste. Ce qui va donner un visionnage ainsi qu’une rencontre assez farfelue des potentiels candidats. Ils jettent leur dévolu tant bien que mal sur Sara, qui porte un lourd passif. Voici ce qu’on peut formuler en guise de pitch.

Bien entendu, rien ne va se passer comme ils prévoient. Entre les ennemis dans l’industrie et ceux qui ressurgissent du passé, nos héros vont devoir faire face à plusieurs embûches sur leur route. Une galerie de bandits en tout genre va les accompagner.

myCanal

Validé a créé la surprise avec son succès immédiat lors de sa disponibilité en streaming en 2020. Une série littéralement construite sur le binge-watching et qui a réussi son pari. Les fans de rap ont été satisfaits de cette fiction, tandis que les autres ont découvert un univers impitoyable. Tous sont restés en attente d’une suite, grâce à l’utilisation automatique des cliffhanger.

Canal+ avait jeté son dévolu sur les apparences trompeuses dans le monde du rap, il y a dix ans de cela. Une série dramatique pleine de cynisme en trois épisodes, réalisée par Ekoué et Hamé, à l’image de leur groupe La Rumeur, avec Bruno Gaccio parmi les producteurs. Elle se nommait « De l’encre » et avait pour personnage principal, Nejma jouée par la rappeuse suisse La Gale, avec une trame moins glamour. Les deux productions ont pour ainsi dire Laurent Bouneau comme dénominateur commun, avec un traitement éclair, mais différent pour chacun.

Dans le monde de Gastambide et ses co-auteurs, au-delà d’une réplique dans le camp adverse, nous sommes loin de la satire et du traitement autour du ghostwriting. Il ne s’agit que d’échapper aux embrouilles par la musique et les portes de sortie qu’elle peut offrir. La fin de la première saison a laissé quelques traces sur ses protagonistes et la rencontre avec Sara, qui sera baptisée Lalpha ne va pas arranger les affaires du label.

Toutes les péripéties rencontrées seront clôturées par une réelle fin. Bien qu’à des moments, on pourrait penser le contraire, lors de l’épisode final. Notamment à cause d’une scène filmée en Live au téléphone, renvoyant à la tension du dixième épisode de la saison 1. Le flou autour de ce dernier sera éclairci.

Caméos

Le grand intérêt reste l’acting des artistes rap et ceux qui gravitent autour d’eux. Ils sont moins importants cette fois, malgré de très bonnes surprises. Notamment celle de Rohff qui est à saluer. Son passage est attendu, bien qu’il soit court. À chaque réplique, Housni semble nous diriger vers son répertoire musical.

Dans le même registre, YL s’en sort avec justesse. Dans sa séquence, on a droit à une petite anecdote sur les tournages de clips à Marseille. Où l’on annoncerait deux lieux au préalable, pour éviter de subir des échauffourées.

Bosh est toujours aussi racaille dans l’attitude, son personnage de Karnage délaisse la musique, pour correspondre intégralement au nom qu’il porte dans la rue. Grosse déception sur la participation exceptionnelle, certes mentionnée au générique mais limitée à l’écran de Saïd Taghmaoui. Un faire-valoir qui est sous-exploité, mais compense par sa tenue. Des survêtements Sergio Tacchini, une marque qui rappelle immédiatement son personnage culte dans le film « La Haine ».

Sam’s compose plus avec son statut d’acteur que de rappeur dans cette saison. Là où Rachid Guellaz joue avec les codes du rappeur street. L’équipe Rap Contenders profite de l’occasion pour rejouer le Main Event de leur 16e édition, pendant que les scénaristes puisent habilement dans le battle de Jazzy Bazz vs Pand’or

Humour gras et grosses ficelles

Malgré les rebondissements dignes d’une série policière, l’humour reste omniprésent. Ce qui semble logique lorsqu’on fait appel à Brahim Bouhlel et Fatou Guinea en ressort comique. Ça peut causer des grincements de dents selon les codes de chacun.

Dans toutes ses bonnes et mauvaises idées réunies, il y a l’absence de remise en question sur le personnage de DJ Sno. On aurait voulu le voir douter, mais pas uniquement sur le fait que la nouvelle venue soit une femme qui rappe, à qui il doit fournir des productions brutes.

Plutôt à la manière d’un Kore lorsqu’il s’est mis à travailler avec Zola, par exemple. Le rappeur d’Évry ne connaissait rien du travail du producteur à succès avant de le rencontrer. Le second refusa d’abord les premières instrus proposées par le premier, jusqu’à ce qu’il présente un résultat qui leur convienne.

C’est l’inverse qui se produit dans le show, Lalpha va enregistrer sur une prod dans le dos du DJ. Elle se doit de le convaincre, sans qu’il ne se remette totalement en question. Sno est un personnage sans relief, qui enchaîne les succès et reste malgré tout la pierre angulaire de la série. C’est un profil assez rare dans le rap français. Tout semble facile, mais nous sommes à la télévision, les situations doivent être simplifiées au maximum. La manière dont travaille la rappeuse est au moins mise en images une fois.

Run the world

L’accent est donné sur l’émancipation de la femme dans notre société et pas uniquement dans le monde artistique. Sara représente aussi bien la jeune mère célibataire, que la rappeuse ou la victime d’une histoire à laquelle elle souhaite s’extirper.

Le message est clair et plutôt bien emmené. Seul bémol dans cette diffusion, deux idylles mal romancées qui sont prévisibles. L’une d’entre elles renvoie à un type de dépendance homme-femme dans la musique en général. Sabrina Ouazani, qui reprend son rôle d’Inès, lance un avertissement rapide là-dessus à travers un dialogue. Situation cocasse lorsque l’on sait qu’elle partage sa vie avec le créateur de la série. La seconde idylle a l’avantage de casser les codes de la séduction.

La part belle est donnée à l’actrice principale sur la bande originale. Laeti détient sept titres sur les vingt-trois que contient la BO. Certains sont en partie audibles, lors du visionnage de la série. Par contre, même si ça correspond à ce qui est montré à l’écran (aucun feat féminin proposé, une seule citation de rappeuse). On note une absence de parité dans le tracklisting, par rapport au message d’ouverture qui est prôné dans la fiction. Pour autant, ce projet reste une excellente rampe de lancement pour sa carrière musicale. Tout comme Hatik, Kerfa pourrait atteindre un succès équivalent.

All the way up

Reste à savoir si le PAF va prendre le pas sur ce genre de programme. Au même titre qu’un télé-crochet et ses produits dérivés, ce genre de feuilletons peut apporter une rentabilité intéressante à des chaînes comme M6, TF1 ou celles de leur groupe respectif.

Franck Gastambide a indiqué qu’il n’y aura pas de saison 3 dans l’immédiat. En précisant qu’il ne faut pas s’attendre automatiquement à une suite et qu’il reste maître à bord. L’avenir de la série semble se trouver ailleurs.

variety.com

On espère que cette case ne sera pas délaissée dans l’hexagone et que l’on pourra découvrir d’autres créations, en dehors de celles annoncées. Au programme, des œuvres audiovisuelles tirées de l’histoire de NTM sont prévues séparément au cinéma et sur Arte.

 

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