Peu de MCs francophones ont réussi à atteindre la puissance lyricale d’Alpha Wann, rappeur du célèbre collectif parisien 1995. Nekfeu, membre le plus célèbre du groupe, a d’ailleurs affirmé à son sujet qu’il était le meilleur rappeur français actuel.
Tout le paradoxe d’Alpha Wann tient là ; la sphère du Rap français le tient en haute estime et salue son aisance au micro, son delivering excellent, la facilité désarmante qu’il a à sortir une grosse punchline par phrase et pourtant le grand public ignore quasiment son existence et va lui préférer des artistes plus bankables et mainstream. Alpha en a conscience depuis longtemps et assume son côté underground et sa volonté d’exceller dans son art, quitte à se fermer des portes.
Son premier album Une main lave l’autre (UMLA), sorti en septembre, est bien l’incarnation de ce parti pris ; départ modeste dans les charts sans réel décollage, malgré une énorme maitrise au micro. En terme de flow, de découpage des phrases, de rimes, d’écriture imagée et bien sûr de punchlines c’est une toile de maître, un travail d’orfèvrerie.
Après de longues années dans l’ombre, le MC de Paris Sud s’incarne enfin comme Philly Phaal, un des, si ce n’est le plus grand kickeur de sa génération. On vous laisse découvrir ça avec un best-of des meilleures phrases et punchlines d’UMLA, découpées en thèmes.
Suprématie lyricale
« J’arrive en mode raptor, rappe fort / En mode débarquement sur les plateformes de téléchargement » (Le Piège)
« J’suis au sommet de leurs pyramides, j’suis le dernier rappeur qui rappe » (Cascade)
Concurrence
« J’viens du bassin parisien, j’te r’garde de haut et j’suis pas sympathique / J’fais pas le rap que ces catins pratiquent / Très peu probable que je tape un platine faut que j’fasse un classique » (Stupéfiant et noir)
« Capuché comme un détraqueur, j’suis le sécateur / Dans les magouilles comme Sepp Blatter, tous ces gratteurs veulent des featurings / J’refuse même quand c’est flatteur, que des délateurs / Le rap français, c’est d’la derm’, j’ai l’nouveau merdier dans l’congélateur » (Parachute Chanel)
« Leur musique c’est du bruit qui m’dérange comme le voisin quand il tape sa meuf » (Stupéfiant et noir)
Sport
« J’surfe sur ces putes comme Kelly Slater, ouais » (Flamme olympique)
« Lève la main, tu parles au Don, une menace à la O-Dog
Connu ici et là-bas aux DOM-TOM, j’arrive comme Lamar Odom » (1500)
« C’est moi qui sait le faire le mieux, pas besoin de faire le bilan, je fais taire le milieu, comme un jeune Ronaldo à l’Inter de Milan » (Flamme olympique)
Mangas
« Dans un autre monde je s’rai Philly Flinguo, le fly nigga fourrure à la Doflamingo, eh » (Cascade)
« Les p’tits se croient à Compton, ils ont des marteaux comme Thor / Pour gagner, ils ont besoin d’Olive comme Tom » (Olive et Tom)
Luxe
« Des billets qu’on empile pour amortir la chute sa mère / J’atterris avec style j’ai mon parachute Chanel » (Parachute Chanel)
« L’homme veut impressionner avec des logos et des sapes / Les seuls qui s’en foutent sont les clodos et les sages / Tout est dans l’paraître, parce que l’homme juge à l’apparence / Faut être paré, surtout à Paris, ouais, j’dis ça mais j’suis pareil / Ca tourne pas rond dans ma tête, ça tourne pas rond, eh » (Le Piège)
Femmes
« J’peux pas r’donner la vue à l’aveugle ou changer une pute en femme au foyer / J’ai qu’vingt consonnes six voyelles, hein » (Langage crypté)
« Tout l’monde rappe, chante, c’est le fantasme / Instagram change les meufs en ‘tasses » (Le Piège)
« Fables, bluff, que du crack; Mes fans veulent que du rap; Mais Phaal veut que du Ralph; Les femmes veulent que tu raques / Si c’est dans l’budget, ma femme aura les diamants; Mais j’peux la laisser sur l’bûcher, éplucher son amant ! » (Langage Crypté)
Popularité et drogues
« J’suis un Dany, j’suis un Fabe, M.O.B.B., flow infâme / J’éclaire ces négros comme un phare, le shit est collant comme un fan » (1500)
« J’suis comme le shit : stupéfiant et noir » (Stupéfiant et noir)
« Avec le shit, j’étais vite fait perché / Les sniffeurs cherchent leur paradis blanc comme Michel Berger / Les dealers ont des avalanches dans les poches, maintenant / Le client veut plus spliffer l’amnes’ mais sniffer la neige » (Le Piège)
Racisme et travail
« Dis à la France que tout se paye, ce pays est en stagnation / Ici c’est racisme et vente d’armes, des clodos à chaque station / Tu l’appelles Mère Patrie, j’l’appelle Dame Nation » (Le Piège)
«On préfère être libres et pauvres, nique les esclaves riches comme les présidents cainf’/ On est dans l’XIV et puis dans l’XV / Mentalité Paris Sud, fuck le globe terrestre / Ils veulent même pas qu’les négros gobent les restes / Les derniers seront les premiers, faut qu’vous l’appreniez / Ils ont niqué nos terres et nos têtes / Ils ont tout pris du sous-sol au grenier / Société détestable, j’suis soutenu par cinq piliers, j’vais rester stable » (Le Piège)
« Contrôle qualité dans la totalité, c’est sur les noirs que la volaille tire / Donc je fais mon truc et je quitte la France, l’Histoire est changée selon qui te l’apprend » (Parachute Chanel)
« La France a des problèmes longs à énumérer / Loi du travail, c’est l’esclavage rémunéré / Facebook, Google, Uber règnent en maîtres / Nos enfants seront fichés avant de naître » (Ça va ensemble).
« Vivre aux heures normales, dans ma vie c’est vintage / La nuit porte conseil négro, j’me couche après mon petit déj’ » (Le Piège)
« Pour se rendre au taf chaque jour, ma mère prend l’tram de six heures vingt / J’comprends ceux qui utilisent leurs flingues, le crime canalise leur faim » (Cascade)
Spiritualité
J’vais à la muscu’ pour le corps, j’vais à la mosquée pour le cœur (Le Piège)
« On veut pas baiser les gos les plus putes / Mais boire les eaux les plus pures / Vrai négro sera inscrit sur ma sépulture » (Ca va ensemble)
Références culturelles
« Appelle-moi : Arnold Schwarzenégro / Donc j’suis l’Terminator et puis l’effaceur / Dans la te-tê, un moteur de raptor, j’brise les rapports comme les renois de Stamford Bridge / J’ai la forme, j’brille, prends un chewing-gum quand tu m’abordes, bitch » (Starsky & Hutch)
« J’ai la haine comme said ou un blood de la westside, Comme d’hab’ j’écoute du Jay-Z, j’regarde du Denzel / J’rêve d’Halle Berry derrière oim sur un YZ » (Le Piège)
« Reste en retrait, j’suis l’best en scred / Comme G-Unit avec 50 Cent / Comme Brick Squad, 10-17 / On m’a dit que tu rappais bien mais c’est dur à avaler comme le whisky sec » (Starsky & Hutch)
« Je sors les pecs comme Van Damme, Bloodsport, Bolo » (Flamme olympique)
« J’suis dans l’bail comme Nathalie, dans la maille comme Jacques Attali / Ils ont flingué Christopher Wallace à Cali / En tant qu’rappeur incroyable j’suis pas en sécurité là-bas » (Flamme olympique)
« On s’prend pour Russell Simmons quand on gère les mailles / Quand on gère les MILFs on s’prend pour Jeremih » (Cascade)
« Retour à l’époque où j’avais pas d’fans, jeune Phaal, fly / Rocawear ou Phat Farm / Alcatel, répertoire, pas fille, pas d’femme » (Pour celles)
Bonus : « J’écoute Cactus de Sibérie dans l’Brabus de Ribéry » (Infinit’ – Le tour).