XXXTentacion – Skins

Critique

Bien que XXXTENTACION ait rendu son dernier souffle en juin, son album posthume SKINS était fortement attendu par le public. Néanmoins, il aura fait beaucoup de déçus. Ce projet reprend les codes de ses deux précédents albums, mêlant versatilité et émotions. Contrairement à ceux-ci, ce 3e album est loin d’être au niveau, il est loin de répondre aux attentes.

A la manière des deux précédents albums, il y a la présence d’une intro. Sauf que cette fois -ci, on entend une voix robotisée au lieu d’entendre celle de X. Première petite déception, cela rend cette intro moins authentique, moins touchante. Surtout qu’elle ne se démarque pas et ressemble fortement à celle de 17. On peut se dire que malheureusement il n’a pas eu le temps d’en faire une. Et ce constat est similaire à celui que l’on se fait au sujet de tout l’album : il est incomplet, sonne trop brouillon, sans doute parce que le rappeur est mort avant d’avoir eu le temps de le finir.

L’album n’est pas mauvais, cependant il donne l’amère impression de regrouper des morceaux « déchets », qui n’étaient pas assez bons pour être sur ses deux précédents albums. Dans sa façon d’être, il est fortement similaire (album court, musiques courtes, très varié, intro a cappella,…) mais là où ça coince, c’est au niveau de sa qualité et son manque d’originalité. Son album « ? » était impressionnant, X surprenait par sa versatilité, on passait du hip-hop au rock, du chant au rap, sans forcément que ça paraisse incohérent, l’album était hétérogène et c’était sa force. Dans SKINS, c’est sa plus grande faiblesse. On se perd, il n’y a pas de fil conducteur, on passe du noir au blanc, en étant que rarement impressionné et jamais étonné.

Il y a quelques bonnes idées, à l’image de Guardian Angel, la première musique, dans laquelle il parle de Jocelyn Flores, son amie qui s’est suicidée, faisant donc suite à la musique éponyme Jocelyn Flores, issue de son album 17, et dont on entend la version inversée de l’instru sur Guardian Angel. La deuxième musique de l’album est Train Food, et c’est sans doute l’apogée de l’album, c’est tout simplement la meilleure musique, c’est une espèce de story-telling dans laquelle le narrateur fait face à la mort, qui est inéluctable, sous forme d’un train qui approche sur les rails où est disposé le corps vivant du narrateur, et toute la question est de savoir si l’issue finale de cette mort est l’enfer ou le paradis :

Ask yourself this final question, is you going down or up?

Recollectin’ all the moments that you never gave a fuck

Now it’s here, death has now arrived, time’s finally up

Avant de mourir, le narrateur fait part de ses remords. Le décès de X donne une autre dimension à cette musique. Des fans ont d’ailleurs rendu hommage à l’artiste en faisant un clip :

Parmi les musiques qui sortent du lot, il y a évidemment One Minute en featuring avec Kanye West, qui pose un très bon couplet. Et finalement, le plus surprenant dans cet album, c’est la présence de Kanye sur une musique qui est à la frontière du rock et du metal. Dans son couplet, il fait référence à pas mal de choses qu’il a traversé, notamment les polémiques, avant de conclure sa partie en parlant des fausses accusations d’agressions (sexuelles) :

She wanna give you the cookie, you Famous Amos

She gave you the pussy, but you ain’t pay for the anus

Now your name is tainted, by the claims they paintin’

The defendant is guilty, no one blames the plaintiff

Les deux dernières lignes pourraient très bien faire référence à ce qu’a vécu X, lui qui avait vu son nom être traîné dans la boue à cause des accusations de son ex, Geneva, qui parlait de violences domestiques. Accusations que le rappeur a toujours niées. Dans cette musique, il n’a pas de (gros) couplet, comme souvent sur cet album. Ici ça ne dérange pas, tant Kanye fait bien le travail, mais dans des musiques où X est seul, telles que Whoa ou What are you so afraid of, c’est regrettable car les deux musiques avaient un potentiel énorme et frustrent parce qu’elles sont inachevées, et les autres ont des allures de démos et/ou ne sont pas très marquantes.

Du coup, ce qui ressort après l’écoute de cet album, c’est la frustration. La frustration car on se dit qu’il avait encore beaucoup de choses à accomplir, la frustration car l’album avait été longuement teasé, la frustration car c’est une déception, la frustration car on a le sentiment que cela a été mal exploité, et la frustration car cela ressemble plus à une opération purement marketing qu’à un vrai album posthume sensé rendre hommage à l’artiste. Mais tout n’est pas si noir, une partie des gains ayant été reversée à des associations humanitaires.

Il est difficile de parler d’un album posthume sans aborder l’aspect moral : peut-on critiquer X pour cet album ? Evidemment que non, c’est pourquoi cet album n’aura pas de note. Il ne l’avait pas fini et ne l’aurait sans doute jamais sorti sous cette forme, cependant on peut critiquer ses proches qui ont sorti un album qui est loin d’en être un, et qui se font de l’argent dessus.

Il faut savoir que peu avant sa mort, X avait signé un nouveau contrat sur le label Empire, contrat qui s’élevait à 10 millions de dollars. Le décès de XXXTENTACION représente donc une très grosse perte financière et artistique pour ce label, ce qui explique que maintenant ils font tout pour faire du bénéfice, SKINS n’étant que le début, d’autres projets devraient suivre. Pour entacher un peu plus la discographie du défunt rappeur ?

Rotka
Rotka
Life's a bitch and then you die