Orelsan – La fête est finie

Critique

Mal vieillir.

6 ans après Le chant des sirènes, le rappeur Orelsan revient avec son 3ème album intitulé La fête est finie. 

Cela fait 10 ans qu’Orelsan est un personnage bien identifié de la scène rap. Son premier album, Perdu d’avance, a été un bol d’air pour beaucoup. Tout d’abord parce qu’il a légitimé le fait d’être un looser et l’a presque rendu cool en revendiquant sa différence. Orelsan n’a jamais été un MC formidable. Il n’a pas de talent technique particulier, son flow varie très rarement et ses punchlines sont assez tirées par les cheveux.

Sa singularité réside dans sa manière de raconter des choses simples, de manière simple. Rentrer de boîte bourré, les dîners de famille, les mangas qu’il regarde, quand tu te fais recaler de boîte, les cuites entre potes etc. Des sujets très banals mais qui ne sont jamais abordés dans le rap français. En ce sens là, Orelsan a quasiment été précurseur, du moins au niveau mainstream.

Figé, piégé dans son personnage

Lorsque Orelsan avait sorti en 2010 l’album Le Chant des Sirènes, il ne s’était que très peu renouvelé. Les thématiques restaient les mêmes et le point de vue n’avait pas changé. Le même ressenti transparaît avec La fête est finie, qui sonne dans les mots et les sujets comme une V3 du premier album. Contrairement à ce qu’il pense et ce que sa fanbase pense également, Orelsan n’a pas du tout changé et cet album n’est pas l’album de la maturité.

Au début on peut effectivement croire que La fête est finie sera un album différent des autres. Dans la puissante introduction qu’est le morceau San, Orelsan dépeint ses peurs, et se livre sur ce souci de changement « Je veux pas rester figé, piégé dans mon personnage comme une prise d’otage à Disney ». Il retombe néanmoins vite dans ses travers.

Dans cet album, Orelsan montre une fois de plus son décalage avec sa classe d’âge (maintenant les trentenaires), mais on est toujours dans la notion de décalage, qu’il exprimait déjà à ses débuts. Le fait de vieillir ne lui a pas apporté de la maturité, juste des décalages sur de nouveaux principes. « Un jour, tu te sens perdu dans les fêtes de famille. Leurs portables sont plein de photos de gosses, toi t’as qu’des photos de gamines »

Même le morceau Paradis, qui devait dépeindre un Orelsan changé, ayant trouvé l’amour est une vaste blague. Déjà parce que le morceau est atrocement niais, mais également parce qu’il va se contredire à ce sujet, notamment sur la 2eme partie du morceau Bonne Meuf où il se dépeint (toujours) comme étant capable de tromper.

Quelques tentatives infructueuses de renouvellement

Il faut bien savoir qu’Orelsan est tout à fait conscient de ses propres limites et du fait qu’il a finalement assez peu de choses à raconter. Durant toute sa carrière il a tenté de cacher ses faiblesses de contenu par du concept ponctuel (Suicide Social, Défaite de famille, La petite marchande de porte-clefs…), morceaux plutôt sympathiques mais qui sont des thèmes one-shot, qu’il ne peut plus réutiliser par la suite.

Au lieu de distiller ses sujets dans ses morceaux, il choisit une approche très scolaire, consistant à assimiler un thème à un bloc et à un morceau. C’est le cas notamment avec l’amour dans Paradis ou la peur du succès dans Quand est-ce que ça s’arrête et c’est ce qui explique en partie sa difficulté à se renouveler.

Autre chose agaçante, Orelsan semble avoir identifié son pattern de construction d’album et il n’en dérogera pas.

San est le morceau un peu introspectif et mieux rappé que les autres (Raelsan). Basique est le morceau énumérant des éléments de la pop-culture et des évidences qui parlent à tout le monde (Changement, Plus rien ne m’étonne, Mauvaise idée). La lumière est le morceau alcoolique et festif (Des trous dans la tête, Soirée ratée). Et Notes pour trop tard est le morceau qui a une durée un peu supérieure aux autres morceaux de l’album, histoire de faire comprendre que c’est l’highlight (Suicide Social).

Orelsan croit avoir rempli sa part du marché et proposé du contenu frais tout en s’ayant renouvelé. Ce n’est que de la cosmétique, le squelette de son album n’ayant pas changé. En se répétant, Orelsan lasse, et cet album, beaucoup trop prévisible pour être apprécié, nous indique que les 6 années qu’Orelsan a passé sans sortir d’album solo n’ont visiblement pas été suffisants pour en tirer une substantifique moelle.

Tibbar
Tibbar
Do you fools listen to music or do you just skim through it ?
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