La tendance 2021 est-elle aux projets communs ?

2020 a laissé un constat encourageant, l’avant-goût d’une tendance bien particulière et encore trop peu expérimentée dans le rap français : les projets communs. Une tendance déjà bien ancrée dans la culture rap US, avec plusieurs projets à succès, dont What A Time To Be Alive du duo Drake x Future, sorti en 2015, ou encore celui de Kanye West x Jay-Z avec l’album Watch The Throne. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant du côté FR, où les rappeurs semblent -une nouvelle fois- en retard par rapport à leurs homologues américains.

Prélude historique

C’est en 1987 que le pionnier de cette pratique, Rakim (légendaire rappeur américain), sort son premier album commun avec Eric B. Paid In Full rencontre un beau succès commercial. La collaboration entre ces deux artistes sera d’ailleurs prolongée pour 6 années, durant lesquelles ils produiront 4 albums. Cette performance en a inspiré plus d’un. Qui d’autre que Drake, Kanye West ou encore Young Thug pour expérimenter cette tendance ? Celle-ci, bien que trop souvent motivée à des fins commerciales, ne semble pas directement affecter la scène francophone.

En effet, ce n’est que dans les années 2000 que les premiers projets communs voient le jour, avec quelques rares réussites, dont celles attribuées aux nombreuses collaborations d’artistes de la sphère d’IAM. Notamment Le retour de l’âme soul de Faf Larage, K-Rhyme le Roi et Def Bond, ou encore l’association d’Akhenaton et Faf Larage sur We Luv New York. En 2012, ce sont aux rappeurs marseillais Soprano et REDK que l’on doit l’un des meilleurs albums communs de l’histoire du rap français avec E=2MC’s. D’après REDK, la recette réside d’abord dans la proximité entre les artistes. Ainsi, le récit de E=2MC’s est celui d’une collaboration née dans la spontanéité.

Deuxième souffle

Vald et Heuss L’enfoiré sont les derniers rappeurs à avoir pris ce pari risqué avec leur album commun Horizon Verticale. Malgré une collaboration inédite et la rencontre de deux univers complémentaires, le projet n’a pas fait l’unanimité. Pourtant associé à une direction et une performance artistique qualitative, les ventes ne reflètent pas les attentes. Est-ce que cela sous-entend que le public n’est pas réceptif à ce genre de projet ? Impossible à dire, tant les projets de ce type manquent à être expérimentés. Mais comme le dit si bien Vald : « être meilleur, ce n’est pas vendre plus » (YAX3).

Manifestement, Vald et Heuss ne sont pas les seuls à vouloir se lancer dans l’expérience. D’autres grandes pointures du rap ont déjà exprimé le souhait de produire un album commun, dont Alpha Wann. Le parisien a récemment sorti don dada mixtape vol 1, un projet qui a déjà beaucoup fait parler de lui et de la probable future collaboration avec Nekfeu. Ce dernier, que l’on retrouve sur 4 morceaux de cet opus de 17 titres, a pour point commun avec Alpha une grande maitrise des mots et des rimes multisyllabiques. Cela incarne leur technique, et on la retrouve nettement bien contrôlée dans le titre aaa, que Nekfeu clôture en chuchotant « projet commun sortira le Jour-J… ».

Une annonce très attendue qui rappelle que le duo a déjà proposé un EP commun nommé En sous-marin (disponible uniquement sur YouTube), sorti en 2011.

D’autres probables collaborations ont déjà été citées dans de nombreux magazines et médias. Notamment celles de Hamza et SCH, Niska et Ninho ou encore Jul et Alonzo. Il ne s’agit ici que de suppositions ou de désirs presque obsessionnels des auditeurs.

Cependant, une nouvelle annonce a récemment fait sensation. Un projet commun belgo-belge, signé Hamza et Damso, devrait voir le jour prochainement. La culture rap francophone peut difficilement rêver de mieux comme connexion pour affirmer cette nouvelle tendance. 

Projection commune

L’année 2020 fut riche en termes de collaborations artistiques et featurings, entremêlant des rappeurs aux univers multiples et divergents. Cependant, elle n’a pas été aussi satisfaisante dans la concrétisation de projets communs à proprement parler. Malheureusement, cela ne semble pas être d’une si grande évidence pour les artistes. Même si certains parviennent à collaborer sur un album entier, d’autres n’y arrivent tout simplement pas. La difficulté se trouve certainement dans l’acceptation de faire des concessions artistiques. Un album commun, c’est l’expression d’une vision commune. En espérant que 2021 soit le bon moment pour les rappeurs francophones de proposer les collaborations tant attendues par leur public.

Rejoins-nous sur Facebook